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Jeux de Fous - Les boules frétillantes
Kelriane
Présentation par Iryamar d'Ezar
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Fiche signalétique :
Epoque |
Tierce Ere PC |
Lieu |
Plateau - Asile de Madrigan |
Races |
Hommes |
Thème |
Jeux / Divertissements |
Auteur |
Kelriane |
Date de publication |
22 Juillet 2003 |
Premier volet de la candidature
de Kelriane à une fonction de Créatrice, Jeux
de Fous - Les boules frétillantes en constitue l'uvre
commandée, basée sur une "histoire vraie",
ou plus exactement sur ce qu'on appelle communément un
"délire" entre quelques membres de l'équipe
de développement d'Althéa - Légendes
& Prophéties d'Ezar. Les combats épiques
entre héros élus des dieux ne sont pas les seuls
dignes d'être racontés. Il en est de même
pour les faits et gestes légendaires de telle ou telle
divinité. Jeux de Fous - Les boules frétillantes
est donc un récit à partir d'un thème surprenant
et décalé. La scène se déroule au
cours de la Tierce Ere P.C. (Post-Catalysmique), sur une île
bien célèbre du Plateau pour tous ceux qui, en
jouant à La Quatrième Prophétie,
sont devenus séraphins ou néphilims. Il s'agit
de l'Asile de Madrigan, cet asile pour tous ceux dont la dangereuse
aura de séraphe a aliéné l'esprit... et
pour quelques autres personnes encore. Ces hommes qui sont enfermés
perpétuellement entre quatre murs, cernés par
un personnel médical qui a également dégénéré,
ont des divertissements curieux. Le mot est faible. Kelriane
en décrit un, dégénérescence d'un
jeu sportif bien connu : le jeu de boules, témoignage
que ces aliénés conservent une part d'humanité
et de souvenirs. Est-ce la meilleure part ? Les résidents
de l'asile croient ce qu'ils pensent voir. Nous faut-il croire
cette vision que Kelriane nous fait partager ? A vous d'en juger
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Jeux de Fous - Les boules frétillantes
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Un
rayon de lumière traverse une vitre et vient frapper
le plancher d'une maison. L'île qui paraissait silencieuse
est maintenant troublée par des piaillements. On pinaille,
on se cherche, on se bouscule, on crie et parfois on pleure.
Deux voix croassant se font plus particulièrement entendre.
- T'as triché !
- T'as perdu !
- Nan c'est toi !
- Mais tu n'as pas à manger l'il. M'enfin c'est
pas prévu, c'est de la triche.
A quelques pas du rayon de
soleil, un néphilim et un séraphin se disputent
sur une question de grande importance, manifestement. Leurs
gestes désordonnés font ressembler la scène
à un ballet de marionnettes dont les fils auraient
disparu. Après quelques tergiversations à voix
plus ou moins basse, les esprits se calment.
- Où est la petite boule ?
- Chut ! Tu vas nous faire repérer ! Elle est là
Le néphilim entrouvre
ses ailes et sort délicatement, de l'une de ses poches,
un oeil d'enfant. Celui-ci a été soigneusement
entretenu, finement huilé, amoureusement baigné
dans différents bouillons, et avec application, pour
qu'il perde son aspect blanchâtre. Il est devenu d'un
bleu aérien, l'iris ayant gardé le vert des
feuilles au printemps. Un enfant ne les a pas assez vues
certainement. Les caquètements de corbeaux continuent.
- Donne-le moi ! Montre-le moi !
- Noooooon ! Il est à moi, rien qu'à moi. Mon
petit jouet... et à nul autre qu'à moi !
Il caresse avec passion l'il
vidé de son regard, simple instrument de jeu au milieu
des plumes et du sang. Des lèvres saignantes, à
force d'être gercées, embrassent goulûment
l'objet fétiche.
- Allez
arrête ! On commence ?
- Voilà.
Et le néphilim soupire
puis jette, d'un geste désordonné et nerveux,
l'il nu de l'enfant. Le petit oeil retombe et rebondit
d'un mouvement flasque et mou, se déforme légèrement
sous l'effet de son propre poids, si bien que l'iris semble
regarder ses assaillants.
- Quel beau tir.
- Allez, à toi.
Le séraphin qui, contrairement
à son compagnon de jeu, utilise des yeux bouillis plutôt
que frits dans l'huile, jauge, se concentre, se prépare,
se mord les lèvres, essuie la sueur qui menace de lui
troubler la vue, et lance son il chéri mais blanchâtre
qui retombe non loin de celui de l'enfant. Les deux boules
d'un genre étrange semblent se toiser. Une main tremblante
s'approche alors de l'un des instruments de jeu et une voix
lente, faible, chevrotante à force d'avoir trop hurlé,
se fait entendre : " Mon il... Mon il...
".
Elle ne peut poursuivre :
une infirmière, par égard pour les joueurs si
absorbés, écrase de son talon pointu et ferme
la chair de cette main outrageante et manifestement dépourvue
d'éducation. Son regard froid se pose sans gentillesse
sur le malotru, irrespectueux des amusements des autres. Elle
le sermonne comme un garnement, de sa voix criarde : "
Il n'est plus temps. Maintenant laissez-les ou je vous déplume
! "
La partie peut reprendre dans
ce calme tout relatif. " Beau coup, beau coup ! "
Le néphilim applaudit. " Mais je suis sur que j'peux
faire mieux. " Il lance, à travers les airs, son
oeil bleu, vitreux et frit. Celui-ci retombe bien trop loin
du petit il. " Mais quel boulet ! " Puis : "
BOULEEEEEEET ! " hurle-t-il. Un rire malsain accompagne
ses paroles alors qu'un il, auquel le nerf est encore
attaché, vole dans la salle et retombe à côté
du regard mort de l'enfant
Le nerf retombe, quant à
lui, par chance --ou par calcul--, sur l'autre il.
" Quel coup. " Des
ongles griffent le sol, cherchant à attraper un des
yeux. " Je vous ai dit d'arrêter ", continue
la voix criarde. " Vous n'êtes pas sage ! Vous
allez m'obliger à sévir ! " Un faible gémissement
lui répond. " Allez, à toi maintenant !
" Le séraphin lance son il d'une main décharnée
et tremblante. Celui-ci fait quelques bonds, mais s'arrête
juste devant le boulet : il a conservé le regard surpris
de son propriétaire qui se l'est vu arraché
par des mains rapaces.
" Ah oui, ça demande
beaucoup de concentration. Alors c'est mon tour ! Technique
de l'atome crochu. " Les spectateurs applaudissent. Venant
de jouer, le jeune séraphin observe la haute stature
de son compagnon et sa silhouette d'oiseau de proie. Des yeux
fous le fixent soudain, les dents du néphilim grincent,
sa voix devient haletante : " J'utilise toute ma magie
et je perds deux boules. " Ses cheveux gras lui tombent
devant les yeux, un filet de salive coule sur son menton.
" Et maintenant
" Il se retourne, les yeux
pétillants de folie. " Et maintenant, regarde
bien ! Hi hi hi ! Tu vas voir
" Le néphilim
prend d'une main vive la sauce du repas du midi et la lance
sur les globes oculaires qui baignent ainsi dans leur jus.
Et les yeux blancs
se mettent à se colorer d'une
étonnante manière !
- Et voilà ! Ca, c'est magique ! Ah !
Il pousse un profond soupir
de satisfaction.
- J'ai toujours les moins colorés !
- Mais
mais, t'as triché !
- Nan, c'est la règle ! T'avais qu'à la connaître.
Les cheveux gras semblent
se battre en duel. De frustration, des plumes tombent à
terre et un filet de salive coule lentement sur le menton,
dégageant une odeur de viande, sans doute celle du
repas. Le néphilim se retourne vers le vieillard à
la main déchiquetée par la soignante, et lui
murmure d'un air complice : " Stress ! j'ai utilisé
toute ma magie. " Le vieillard, les ailes décrépies,
gémit tandis que le séraphin lui flatte la tête
: " Bon... je place. " Le séraphin lance
son oeil qui glisse sur la sauce. Il saute par dessus les
yeux qui ont commencé à geler dans la graisse,
et roule contre le nerf optique. " Ouah ! Le ricochet
de la bâtarde de vie ! " s'exclame son acolyte.
Un jeune séraphin, cherchant
avec courage à protéger son déjeuner, se
met à courir au milieu du champ d'yeux et en écrase
malencontreusement un, propriété de l'autre séraphin
-celui en compétition. " Technique de l'holocauste
! " D'une main rapide, alors que le pauvre s'excusait d'avoir
interrompu l'amusement de tous --et surtout des aides-soignants--,
il est prestement dégagé : notre néphilim
se saisit de son bol. " J'ai sacrifié une boule,
mais en échange, j'ai de nouveau ma magie. Hi hi ! Hi
hi ! " Le séraphin reste éberlué.
" Technique de la poulette ! " Il tend le bol à
une infirmière --psychotique--, maîtresse des jeux
tout comme des autorisations. Celle-ci le remercie, enfonçant
sadiquement son talon dans l'il adverse qui éclate
et répand son jus goûteux.
" A moi maintenant !
Technique de l'atome crochu. " Avec un sourire torve
et dément, le séraphin lance un verre d'eau
et lave ainsi partiellement les yeux. La couleur redevient
presque celle d'avant : les yeux ont encore une fois été
inter-changés. Enfin dégagé de l'emprise
de la jeune femme qui préférait écraser
son pauvre il droit plutôt que sa main, le vieillard
aveugle saute au milieu des boules et l'on entend le néphilim
déblatérer au milieu des piaillements et jacassements
: " Poussin par ici ! Granulé, par là !
Ah, Chute maintenant. Hop, Digestion ! " Et le
vieillard de s'étaler au milieu du terrain de jeu,
dans une mare spongieuse de mélange d'yeux éclatés.
Quand il se relève,
les deux adversaires font les comptes : " Tu as gagné
! " Le séraphin sourit, confiant : " Eh oui...
" Pourtant, le néphilim le regarde avec folie
: " Donc, tu me dois quelque chose, et je n'ai plus de
petit, maintenant
" Il fixe l'il droit de
son partenaire de jeu. Sa main, telle une serre animée
de sa propre volonté, se dirige vers lui sans trembler.
Kelriane,
Vingt-Deuxième Jour du Mois d'Hikhatim-Bion |
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